Après un mois de compétition pour le moins intense et riche en rebondissements, le Mondial brésilien s’apprête à donner son verdict. Pas forcément à la fête en début de tournoi, les nations européennes ont finalement plutôt bien tiré leur épingle du jeu. L’Allemagne, qualifiée pour la finale, et les Pays-Bas, éliminés en demi-finale, en tête. Mais outre les gardiens et les principales têtes d’affiche, qui ont émaillé cette Coupe du monde de géniales fulgurances, ce sont les sélectionneurs qui ont marqué les esprits. Palmarès des sélectionneurs européens.
1. Joachim Löw
Honneur à l’Allemagne, proche d’une quatrième étoile. Surprenante en 2006 à domicile, déjà proche à l’Euro 2008, battue à l’expérience en Afrique du Sud en 2010 et victime de Mario Balotelli à l’Euro 2012, la Nationalmannschaft est globalement toujours là. Demi-finale minimum. Mais le problème c’est que cette nouvelle génération de joueurs, plus techniques que physiques, plus chatoyants que cyniques, ne gagne plus à la fin. Suffisant pour susciter le scepticisme autour de la personne de Joachim Löw, en poste depuis 2006 et incarnation de cette nouvelle philosophie de jeu. Pourtant rien ne semble l’atteindre, toujours placide et classe, c’est comme s’il savait qu’un tel niveau et une telle régularité allaient finir par payer. Le 4-0 contre le Portugal en poule a été suivi d’un intimidant 7-1 en demi-finale contre le Brésil. Probablement l’apogée de la méthode Löw : un jeu résolument collectif pratiqué par des battants efficaces et sobres. En finale, les Allemands ont tout pour battre une Argentine décevante, célébrer une quatrième Coupe du monde amplement méritée et accessoirement propulser Löw au Panthéon du football.
2. Louis van Gaal
Deuxième de cordée : Louis van Gaal, l’orgueilleux génie batave surnommé le Pélican en raison de son cou démesuré. Sa carrière a été jalonnée de succès et de désillusions, de conflits de personnalité et de prouesses tactiques. Au fond, il aura été infiniment meilleur pour faire émerger des apprentis footballeurs que pour gérer des stars qui, en général, n’aiment pas trop de faire houspiller par un dictateur. La dernière grande génération du mythique Ajax Amsterdam est la sienne : Van Der Sar, Davids, Seedorf, ou encore Kluivert, devenu son entraineur adjoint. Les Pays-Bas 2014 sont de la même veine. Une équipe inexpérimentée encadrée par quelques stars confirmées plutôt sur la pente descendante. A la baguette, un homme qui n’a peur de rien ni de personne (sauf de Johan Cruijff mais c’est une autre histoire, une histoire d’égos). La victoire 5-1 en poule contre l’Espagne est la sienne. L’entrée du gardien remplaçant à 1 minute d’une séance de tirs aux buts décisive en quart de finale, est peut-être le plus beau coup de bluff de l’histoire de la Coupe du monde. Seul regret : ne pas avoir été au bout de cette logique en poussant davantage une équipe d’Argentine fatiguée en demi-finale.
3. Marc Wilmots
Avec un brin d’exagération, on pourrait pronostiquer la future nomination de Marc Wilmots au poste de Premier ministre belge. Sous sa houlette, l’une des plus belles générations de l’histoire du football belge est en train de s’imposer comme l’une des meilleures formations d’Europe et du monde. Jamais simple de faire cohabiter des joueurs à qui on répète depuis des années qu’ils sont les plus forts. Alors quand ils ne parlent pas la même langue… Avec lui, pas de passe-droit, seulement du travail et de l’humilité. Tout le monde peut se retrouver sur le banc, peu importe le montant de son salaire hebdomadaire. Le résultat au Mondial, à défaut d’être éblouissant, a été conforme aux attentes, et c’est déjà pas mal pour une nation qui n’avait plus joué de Coupe du monde depuis 2002. Pas de génie technique mais un fighting spirit à toute épreuve. Suffisant, du moins pendant quelques semaines, pour donner envie aux Belges de se rassembler sous les mêmes couleurs.
4. Didier Deschamps
C’est vrai, Didier la Gagne n’a pas gagné. Mais ce n’était pas exactement sa mission, seulement son instrument. Depuis 2006, l’équipe de France a sombré dans une ville sud-africaine désormais plus célèbre pour les Français que la plupart de nos préfectures, et a atteint une envie de jouer ensemble qui a frisé le niveau zéro. Avec Deschamps, l’aboyeur et capitaine de 1998 et 2000, l’objectif était d’abord de reconstruire une équipe, avant d’en faire une équipe qui gagne. En ligne de mire : l’Euro 2016 qui aura lieu en France. Mieux vaudrait y faire bonne figure. Et c’est à la faveur d’une fraiche soirée de novembre que la France s’est relevée. Bien sûr grâce à une victoire, celle de la qualification pour le Mondial brésilien. Ensuite, quelques choix heureux, dont celui de se passer de Samir Nasri, accusé de semer le trouble dans le vestiaire. Et une victoire éclatante contre des Suisses qui s’étaient promis de manger du coq. La défaite contre l’Allemagne en quart de finale, attendue, laissera un goût partagé de frustration (défaite seulement 1-0) et de promesse : celle d’un groupe soudé qui peut aller à guerre ensemble.
5. Vahid Halilhodzic
Les amateurs de football ne connaissait pas forcément cette image de Coach Vahid, d’ordinaire plus père fouettard au regard terrifiant que volubile et passionné. L’effet Algérie probablement. Sous sa direction, ceux qu’on surnomme les Fennecs ont réalisé une prestation hors norme. Une victoire brillante contre la Corée. Une qualification arrachée contre la Russie. Et une prolongation en 8e de finale qui a donné des sueurs froides à la grande équipe d’Allemagne. A la fin ? Les larmes de Vahid Halilhodzic, le sélectionneur bosnien de l’équipe d’Algérie. Elles marquent la fin d’une épopée miraculeuse et le début d’un mythe au pays.
6. (Bonus) Fabio Capello
En foot, il faut des gagnants (voir ci-dessus) et des perdants. Pour une fois, Fabio Capello, le sélectionneur italien de la Russie au CV long comme un terrain fait partie de la seconde catégorie. Et dans les grandes largeurs. De loin l’entraineur le mieux payé du Mondial, il a eu la chance d’avoir un groupe très abordable : Belgique, Corée du Sud et Algérie. Pour… aucune victoire et des prestations terriblement ternes. Eliminée après le premier tour, son équipe n’a rien produit. De retour en Russie, Capello va être convoqué par le Parlement et va être soumis à la question. Il est peu probable que son successeur soit étranger…